« Les voisines » est issu du premier recueil d’Alfian Sa’at, One Fierce Hour (1998)
Pendant Hari Raya elle frappe à ma conscience,
Je frappe à sa porte et lui donne des cakes.
Elle dit qu’ils sont bons et me donne
Des bonbons gélatineux. Je les benne.
Pauvre femme, pas foutue de faire des cakes.
Tous les jours ses enfants mangent Picard après l’école.
C’est pour ça que l’aîné est en lycée technique
Et que la cadette n’épelle même pas son nom.
Si j’avais son âge je ne m’habillerais pas si court chez moi.
Aucune honte, elle ne sait pas masquer ses formes.
Quand je bats mes enfants qui font les sales gosses
Je ferme la porte : c’est une ragoteuse.
Mais elle tape ses enfants plus fort que moi
Que peut-on y faire ils sont comme ils sont.
Une fois je l’ai entendu crier qu’elle voulait se tuer.
Ces gens incapables d’évaluer leur propre vie.
D’autres fois je la vois sourire je souris en retour
Et ses enfants sourient et ils m’appellent tata.
Mais les poings bien serrés on garde dans nos mains
Chacune les clés de chez soi, et tous les soirs on ferme à double-tour.