Marigot 9

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Imagine que toutes les rives de tous les cours d’eau s’appellent Brooklyn. Comme seule la peau sans déchirures du fleuve expose en guise d’organes les entrailles du vrai invisible, tu te gares normalement pour rechercher la magie dans l’image, et piques l’eau de questions jusqu’à la chair de poule. Imagine que de l’embouchure s’élève une voix : J’offre des signes, compose un drame avec leurs anagrammes. Fais-tu quelques pas, te retournes ? Dois-tu et que dois-tu conclure des perspectives prudentes qui distribuent ici et là une bouche rouge, des murs jaunes ? Qu’a dit la terre ? Combien de langages sont drainés ? Combien d’accents du nord au sud ? À quelle vitesse ? Le fleuve apporte les maladies et les médicaments, une certaine gravité le charge, l’obstacle offre un spectacle en suspension mais le réel est un dommage qu’on aurait tort d’interpréter comme un outrage. Tout discours laisse dans l’air ses empreintes molles comme un bateau sur l’eau. Le débit cicatrise, dur comme la drogue.

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[Aquarelle de Jérémy Cheval]

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